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12 février 2007

Lis Le Monde

CG0_0069Ce matin comme bien souvent, je me suis plongé dans la lecture du monde, qui, à défaut d’être instructive, reste néanmoins intéressante. Je me permets cette assertion considérant le fait que sur trois mois de lectures quasi quotidiennes, seul un article m’a ouvert à des réflexions véritablement nouvelles.

Certes tel n’est pas le but premier d’un quotidien, mais les articles de fonds devraient en être également une composante. A mon observation, deux analyses donc : ou ma culture est fort étendue, ou Le Monde et la presse en général ont perdu en facultés d’information et de réflexion…

Bref ce matin, une page intéressante et inconsciemment éminemment instructive sur la fameuse objectivité. Je vous donne à lire cet article (chut hein, sa reproduction est interdite…) :

Prison ferme pour Kemi Seba, fondateur de la Tribu Ka

Le fondateur de l'ex-Tribu Ka, Stellio Capo Chichi, alias Kemi Seba, 25 ans, a été condamné, le 9 février, par le tribunal correctionnel de Chartres (Eure-et-Loir), à cinq mois de prison, dont trois avec sursis, pour "outrages" envers le directeur de la sécurité publique du département.

Le leader de cet ancien groupuscule extrémiste noir, dissous en 2006, avait été interpellé la veille, à l'issue d'une altercation avec les policiers, sur le parking d'une grande surface de la ville, alors qu'il tentait de tenir un meeting. Deux autres militants, qui l'accompagnaient, Yédé Awo, 26 ans, et Cyrille Kamdem, 28 ans, étudiant en histoire, se sont vu infliger respectivement trois mois de prison, dont deux avec sursis, et deux mois, dont un avec sursis. Les trois hommes, qui étaient poursuivis dans le cadre d'une comparution immédiate, ont été écroués.

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La Tribu Ka a disparu officiellement le 28 juillet 2006, à la suite d'une équipée antisémite dans le quartier du Marais à Paris. Mais Kemi Seba est bien présent sur Internet où son site annonçait ces jours derniers la création à Chartres d'une "antenne du GKS" (Génération Kemi Seba), la nouvelle organisation destinée à prendre la relève.

Le mouvement avait refait surface à Tours le 14 janvier. "Je ne remercierai jamais assez M. Sarkozy pour cette publicité inespérée", avait ironisé Kemi Seba, évoquant la dissolution de son organisation.

Dans le box du tribunal, Kemi Seba s'est présenté comme un "militant défendant la dignité de citoyens français" qui n'ont pas la même couleur de peau et portent "des chaînes depuis cinq cents ans". Il reconnaît avoir proféré "racaille sioniste" à l'adresse du directeur de la sécurité publique qui se trouvait face à lui. "Sioniste n'est pas un gros mot, que je sache. Je ne suis pas un antisémite notoire. Je n'ai jamais été jugé pour cela. Il y a des juifs antisionistes", a-t-il déclaré au tribunal. Les trois hommes devraient être jugés prochainement pour incitation à la haine raciale, la procédure de la comparution immédiate ne le permettant pas.

Régis Guyotat

Lisant ceci, je me suis donc dit : «  un noir, se définissant avant tout comme noir, antisémite, c’est intéressant ! ». Bref je continue la lecture et arrive à la fin où l’insulte reconnue par l’accusé (au procès ?, il manque une information) est « racaille sioniste ». Manque également une deuxième information, en quoi consistait le raid antisémite cité plus haut, a-t-il un lien avec la rencontre du directeur de la sécurité publique de Chartres ?

M. Ka a raison, sioniste n’est pas une insulte raciste. Un sioniste lutte pour la création d’un état d’Israël, et ce, à géométrie variable (frontière, idéologie marxiste ou ultralibérale, état judéo-arabe ou purement Juifs, etc.). Le temps ayant passé, ce mot n’est guère employé que pour l’extrême droite israélienne, usage impropre. L’article mélange finalement beaucoup de notions. On doit le relire deux fois pour comprendre que l’équipée antisémite est indépendante de cette condamnation et que la condamnation pour haine raciale annoncée à la fin de l’article semble relever de cette action parisienne.

Voici donc où je veux en venir sur le plan journalistique, cet article outrepasse la neutralité (impossible à atteindre soit dit en pensant) de la relation d’un événement. Il joue en effet sur différentes cordes sensibles de notre bien pensance : je suis novateur en disant qu’il existe un racisme noir, et attention, un juif (ce pourrait être une tapette) est un être à protéger. L’antisionisme n’est pas un antisémitisme. Un outrage à un agent de l’état peut revêtir la forme d’un « sale petit » ou « mal baisé », tout aussi bien que celle d'un « racaille sioniste ». L’article, par ses manques d’infos, ou la position semi partisane, parfaitement acceptée par la bien-pensance ambiante comme objectivité, de son auteur amène donc une confusion stigmatique de bien des notes touchant au racisme. La dernière phrase tendant a rapproché cette première condamnation de l’inculpation pour haine raciale, n’est pas étrangère à ce mélange : « Les trois hommes devraient être jugés prochainement pour incitation à la haine raciale, la procédure de la comparution immédiate ne le permettant pas. »

Pour ouvrir un autre débat, aujourd’hui, notre société n’est certes pas raciste, mais discriminatoire. Je ne crois pas qu’un homme existe avant tout comme noir, juif, homosexuel ou émigré. Je n’existe pas comme blanc. Je n’existe pas non plus comme journaliste, encore moins comme émigré. Non, je suis tout à la fois un journaliste, plutôt petit, ayant des affinités socialistes en Amérique du Sud, amateur de bière belge et de fromage bien français, vivant entouré de Péruviens, etc.

Il reste malheureusement parfois nécessaire de rappeler que la différence ne se pose en différence que face à un référentiel. Nous sommes une sommes de caractéristiques, et non pas de différences. Ce que je reproche à la pensée dominante est de souvent vouloir protéger un homosexuel comme homosexuel et non comme un tout social, physique, etc.

On en arrive alors à une autocensure, écartant toute velléité de vrais débats de société. Pourtant nécessaires, je crois, à la lumière des problèmes dans les banlieues, l’éducation...

PS : j’use du mot « tapette » à un moment, pour faire prendre conscience de l’importance du sens et surtout de la portée des mots. Ceux qui connaissent ma tendance à l’assertion raciste me taxeront de faire deux poids, deux mesures. Mon humour discutable sur ce thème ne fait que jouer sur ce décalage : une société, qui porte la notion aux nues et méprise sa traduction en mot.

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